Pauvreté

Chaque jour, huit personnes sans abris meurent dans la rue en France

Pauvreté

par Sophie Chapelle

Ils s’appelaient Greg, Anne-Marie, Lionel, Julio... Le plus jeune était un bébé de trois semaines, la plus âgée avait 96 ans. Ils font partie des 501 morts de la rue sur le territoire français, recensés par le Collectif Les Morts de la Rue pour l’année 2016. Une lecture de leurs noms, avec le jour et le lieu de leur mort, a eu lieu le 21 mars sur la place du Palais Royal à Paris pour leur rendre hommage et leur offrir des funérailles dignes [1]. Selon le Collectif, le nombre réel de décès de personnes sans abris pourrait être six fois plus élevé. Dans un rapport publié en décembre dernier, le nombre réel de décès de personnes « SDF » est estimé à 2838 personnes en 2015. Soit près de huit personnes chaque jour, qui ne font quasiment jamais la une des médias.

Quelles sont les causes des décès ? Ces personnes ont en général passé dix ans dans la rue avant de mourir. Leur âge moyen est de 49 ans, soit une espérance de vie trente ans inférieure à la moyenne des Français. 43 femmes figuraient dans la liste des morts de 2015, soit 8 % des décès. Six d’entre eux avaient moins de cinq ans.

Dans la rue, on meurt toute l’année, avec cependant trois pics : en février, en juillet et en octobre. 44 % de ces personnes signalées sont décédées sur la voie publique ou dans un abri de fortune. Un peu plus d’une sur trois seulement (37 %) ont été conduites à l’hôpital avant de mourir. Près de la moitié des causes de décès sont inconnues. Le rapport note « une nette surreprésentation des accidents et du résultat d’agressions par rapport à la population générale ». Pour la très grande majorité, ces personnes avaient des liens avec leur entourage : voisinage, amis, maraudes de bénévoles, accueil de jour, famille... Pour le collectif Les Morts de la Rue, l’enjeu est d’« alerter les nombreux partenaires et acteurs de la société afin que des mesures soient prises allant dans le sens d’une meilleure prise en charge des personnes de la rue ».

Un SDF sur quatre est salarié

« Dans la vraie vie, un SDF sur quatre est salarié, avoir un emploi ne garantit plus d’avoir un logement », rappellent une cinquantaine d’associations ayant lancé L’Autre Campagne. Qui relève quelques chiffres saisissants : 7,5 % des travailleurs vivent sous le seuil de pauvreté. Certains dorment dans leur voiture, en squat, au camping...

Par ailleurs, 25 % des personnes sans domicile sont salariées et majoritairement en CDI ! « Mais elles occupent généralement des emplois à temps partiel pour un salaire avoisinant les 900 euros par mois, ce qui ne leur permet pas de trouver un logement dans les zones tendues », soulignent ces associations [2]. Autant de données qui visent à en finir avec la stigmatisation des plus démunis. Selon la Fondation Abbé Pierre, 141 500 personnes étaient, en 2016, privées de domicile. Entre habitation de fortune, hébergement collectif ou nuits à l’hôtel, elles risquent en permanence de se retrouver à la rue, et que la pauvreté et ses conséquences leur soient fatales.

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