Privatisation

Des étudiants bloquent un domaine de 300 hectares menacé de destruction

Privatisation

par Lola Keraron

En Île-de-France, des étudiants bloquent depuis le 16 mars le domaine de Grignon. Propriétés de l’État, ces 300 hectares pourraient être vendus à des promoteurs immobiliers. Bien loin des promesses du gouvernement d’en finir avec l’artificialisation des sols.

Barricades, ciments, mise en place d’un système de restauration collective... Depuis mardi 16 mars, à l’aube, des étudiants en agronomie s’organisent en vue d’empêcher l’accès au domaine de Grignon. Situé dans les Yvelines, à 25 minutes en transilien de Paris, ce site de 291 hectares dont 121 de terres agricoles, constitue un patrimoine historique et écologique rare. Depuis près de 200 ans, ce domaine est un haut lieu pour l’enseignement et la recherche en agronomie. Encore aujourd’hui, il forme chaque année des centaines d’étudiants en première année à AgroParisTech (Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement). Inscrits aux monuments historiques, le château du 16e siècle et ses autres bâtiments sont entourés d’écosystèmes forestiers et de zones humides riches en biodiversité. Les futurs ingénieurs forestiers et agronomes soulignent l’importance des expériences de terrain que permet ce site pour appliquer en pratique leurs connaissances sur la complexité du vivant.

Dans l’appel d’offres, l’absence de toute référence à la transition écologique

En 2015, le ministère de l’agriculture a décidé le déménagement d’AgroParisTech à Saclay en vue d’en faire, avec d’autres grandes écoles, un pôle de compétitivité de l’enseignement supérieur et de la recherche renommé à l’international. Cette mise en vente par l’État a pour corollaire la destruction de terres agricoles d’une fertilité exceptionnelle. Malgré le désaccord de la grande majorité de la communauté d’AgroParisTech – conseil d’administration et étudiants confondus –, la décision de vendre Grignon a été actée. Les sociétés Alterea et Grand Paris Aménagement figurent parmi les acheteurs potentiels*.

Une alternative existe avec le projet Grignon 2026, porté par la communauté de communes de Thiverval-Grignon. Il vise à créer un centre d’éducation et d’innovation dédié à l’agroécologie et ouvert à tous. Mais selon les étudiants, l’orientation de l’appel d’offres laisse de maigres chances à ce projet de l’emporter. Les critères de sélection sont marqués par l’absence totale de mention d’agronomie et de transition écologique. « L’appel d’offres est complètement tourné vers les promoteurs. Nous trouvons cela inacceptable », affirme un étudiant d’AgroParisTech.

Alors que la décision de vente du site doit aboutir le 26 mars avec la sélection de l’acheteur final, les étudiants ont décidé en assemblée générale le 14 mars de lancer un blocage pour se faire entendre des ministères de l’Agriculture et des Finances. Ils dénoncent notamment « une absence totale de consultation des étudiants, des chercheurs et professeurs, du personnel AgroParisTech et des habitants de Thiverval-Grignon quant au rachat du site ». Alors que ce patrimoine public d’une grande richesse écologique, historique et culturelle est menacé d’être cédé à des promoteurs immobiliers, le collectif appelle à se mobiliser pour garantir à ce site un avenir désirable.

Lola Keraron
Crédit photo : collectif Stop Privatisation Grignon.

*Mise à jour le 18 mars 2021 : Contrairement à ce que nous avions initialement écrit, la multinationale Vinci ne figure pas parmi les acheteurs potentiels, mais participe au montage du projet alternatif Grignon 2026 pour restaurer le château.

 Pour en savoir plus sur le projet Grignon 2026, voir le site.

 Pour suivre la mobilisation : leur compte twitter et leur page facebook