Désobéissance civile

Ils réquisitionnent des chaises dans les banques pour dénoncer la fraude fiscale

Désobéissance civile

par Sophie Chapelle

A visage découvert, trente militants de différents mouvements et organisations [1] ont « réquisitionné », le 1er octobre, douze chaises dans une agence BNP Paribas à Paris. Cette action fait suite à un appel à la désobéissance civile, lancé la veille par 100 personnalités, pour mettre fin au système organisé de l’évasion fiscale et des paradis fiscaux. « Rien qu’au niveau de l’Union européenne, l’évasion fiscale coûte 1 000 milliards euros par an aux budgets publics, écrivent les signataires. Elle est organisée en grande partie par les banques, comme l’a montré le scandale HSBC. Les banques françaises ne sont pas en reste : la première d’entre elles, BNP Paribas, détient 171 filiales dans les paradis fiscaux, dont 7 aux Îles Caïmans ! » [2]

D’ici l’ouverture de la COP21 le 30 novembre à Paris-Le Bourget, 196 chaises devraient être réquisitionnées dans les agences des banques françaises les plus implantées dans les paradis fiscaux (BNP, Société générale, Crédit agricole, BPCE). Soit autant que le nombre de parties représentées au sein de ces négociations sur le climat. Ces chaises serviront à organiser une action symbolique visant à dénoncer l’immobilisme des États et à inciter les citoyens à entrer en action.

Les négociations bloquent notamment sur le financement du Fonds Vert – 100 milliards de dollars d’ici 2020 par les pays riches – pour aider les pays du Sud à réduire leurs émissions et à s’adapter au changement climatique. Les organisations à l’initiative du fauchage de chaises reprochent aux gouvernements de se tourner vers le secteur privé et les banques pour alimenter ce Fonds, non pas avec des dons mais des prêts. « L’argent ne manque pas, il est dans les paradis fiscaux, lancent-ils. C’est une question de choix politique : en finir avec l’évasion fiscale dégagerait des financements publics décisifs pour des politiques de transition écologique et sociale. »

En France, la fraude fiscale représente un manque à gagner pour les fonds publics de 60 à 80 milliards d’euros, et atteindrait 2000 milliards d’euros au niveau européen. D’importants moyens policiers ont été déployés ces derniers mois pour retrouver des chaises réquisitionnées chez HSBC [3]. Un excès de zèle que l’on espère aussi vif dans la lutte contre l’évasion fiscale.