Lettre ouverte

Énergies fossiles : « Au nom de la guerre en Ukraine, ne ressortons pas tous les projets enterrés ! » 

Lettre ouverte

par Collectif

En Lorraine, une entreprise surfe sur les débats sur la dépendance au gaz russe pour promouvoir son projet de gaz de couche. Dans cette lettre ouverte, des organisations demandent au gouvernement de ne pas relancer ces projets fossiles.

Lettre ouverte à Emmanuel Macron, Élisabeth Borne (Première ministre), Agnès Pannier-Runacher (ministre de la Transition énergétique) et Christophe Béchu (ministre de la Transition écologique).

Profitant de la guerre en Ukraine et des tensions énergétiques, des entreprises gazières tentent de relancer leurs activités en faisant miroiter l’indépendance ou des réserves mirifiques - en réalité inexploitables -, et en avançant des arguments fallacieux pour tenter de faire reculer le gouvernement sur ses engagements climatiques [1].

En Lorraine, l’entreprise « La Française de l’Énergie » surfe sur les débats actuels sur la dépendance de l’Europe au gaz russe pour relancer sa campagne de communication dans le but d’obtenir une autorisation pour extraire du gaz de couche de charbon. En réalité, une très faible part de ces réserves est réellement récupérable [2].

L’obtention du permis « Bleue Lorraine », impliquerait le forage de 400 puits sur 191 km2 et mettrait en péril la ressource en eau potable, détruirait des terres agricoles, et libérerait d’importantes quantités de méthane, puissant gaz à effet de serre.

Un projet de gazoduc entre la Catalogne et les Pyrénées orientales pour le gaz de schiste

Collectifs, associations, citoyens et même élus ont alerté depuis plusieurs années sur les risques de ce projet, et demandé au gouvernement français de rejeter cette demande de concession. Ils s’inquiètent aujourd’hui de l’opportunisme de cette entreprise spéculative qui espère tirer profit de la situation géopolitique pour faire entrer les réserves de gaz dans les actifs de l’entreprise.

Ces pressions de l’industrie gazière ne sont pas isolées. En Catalogne, l’Espagne propose de relancer la construction du gazoduc MidCat – 120 km entre la Catalogne et les Pyrénées orientales- afin d’y faire transiter du gaz de schiste nord-américain, livré en Espagne sous forme liquéfiée (GNL).

La Commission européenne est sollicitée pour réactiver cette interconnexion, cette fois en changeant de sens le flux gazier : en 2017, il était prévu d’y faire passer du gaz russe dans le sens France-Espagne et aujourd’hui ce serait du gaz de schiste nord-américain dans le sens Espagne-France. Ce projet ne peut répondre au problème d’approvisionnement actuel : il faudrait plusieurs années pour que ces infrastructures soient opérationnelles. Ces fausses solutions ne feraient que nous enfermer davantage dans notre dépendance aux énergies fossiles et repousser le problème.

Le piège serait d’autoriser des projets, en réaction immédiate à l’actualité

Certains en profitent même pour tenter de remettre sur la table des études sur le gaz de schiste et des terminaux gaziers ; projets qui avaient été interdits ou abandonnés. Rappelons que peu importe la provenance et la méthode de production, il faut s’attendre à l’avenir à des tensions récurrentes sur le prix des énergies fossiles.

Le piège serait d’autoriser des projets, en réaction immédiate à l’actualité, et de se retrouver face à des conséquences catastrophiques dans les prochaines années. Pourtant il existe des rapports qui nous montrent comment se passer des importations russes sans nouvelles infrastructures et sans nouvelles exploitations fossiles.

Le nouveau gouvernement sera-t-il aveuglé par la crise énergétique au point de perdre de vue la menace climatique ? Sortir des énergies fossiles est une urgence absolue reconnue par l’ensemble de la communauté scientifique. Il serait aberrant qu’après l’énième alarme du GIEC, la France contribue encore au développement des énergies fossiles. 

Deux choix opposés s’offrent à vous : allez-vous vous engager vers de vraies solutions d’avenir ou tomber dans le piège qui consiste à reculer pour soi-disant mieux sauter ?

La France - et l’ensemble des pays européens - doivent dire halte aux fausses solutions ! Le chemin à suivre est celui d’une vraie transition énergétique, de la sobriété, de la modification de nos modes de consommation et de transport. La crise internationale actuelle nous invite à cesser sans délai la course en avant dans le domaine des énergies, quelle qu’en soit la source - et à rompre notre dépendance aux énergies fossiles d’où qu’elles proviennent. 

Nous exigeons du nouveau gouvernement et de nos députées et députés qu’ils démontrent leur capacité à être à la hauteur des enjeux climatiques. 

Ni fossiles, ni fissiles, ni ici ni ailleurs.

Signataires :
350.org
Greenpeace France
Les Amis de la Terre France
Les Amis de la Terre Pays-Viganais 30
Les Amis de la Terre 57
Fédération - Lorraine Nature Environnement
Fédération -Flore 54
Vosges Nature Environnement
La Voix de l’Arbre France
Fondation Danielle Mitterrand (France Libertés)
Aitec
Attac France
Attac Paris
Attac Moselle
Attac Romans
Attac Mâcon
Attac Périgueux
Attac Alès Cévennes
Attac93sud
AttacUzège (30)
ATTAC 45
Attac21 
ATTAC74 (qui regroupe les 3 comités locaux de Genevois, Chablais et Annecy)
Alternatiba Nord Franche-Comté
Lorraine Association Nature
Vigilance Hydrocarbures France 
EDA Lille
Eau Secours 62
GDEAM 62 
Solidaires Moselle
CRI-AC ! - Collectif Relais d’Informations et Actions Citoyennes 38
Association de préservation de l’environnement local 57
Non au gaz de schiste 74 Pays de Savoies et de l’Ain
Association Vervillages
Association pour la promotion des énergies renouvelables AMPER
Collectif BASTAGAZ’ALES
Consom’acteurs
Association HIRRUS 
MAN Moselle
Metz Marche pour le climat
Association de défense contre la pollution Sarreguemines et environs
Association l’Inventerre du pré vert-Dieuze-57
Association Quand On sème
Collectif du lien et du bien
Association GECNAL - Groupement d’Etude et de Conservation de la Nature en Lorraine
Collectif nonaugazde schiste 91
Collectifs Stop au gaz de schiste en Rhône-Alpes
Collectif de défense des bassins miniers Lorrains
DEnosMAINs
Collectif Houille-ouille-ouille 59/62
Association La rêverie
Association Le repère
Sortons du nucléaire Moselle
Comité mosellan de soutien à Bure
A.L.M.E.C.
Les Amis de la Confédération paysanne d’Alsace
Collectif Alsace des luttes paysannes et citoyennes
Air Vigilance
Metz à Vélo
Association STOP KNAUF ILLANGE-57 
Comité de soutien Bure-Longwy
Association Ginkgo Mon Amour
Metz en Transition
Stop Fessenheim
Hêtre Vit Vent
Ecologie & Démocratie
Association de Défense de l’Environnement de Petite-Rosselle et Alentours
Alternatiba Rennes
Association oiseaux-nature
Entente pour la Défense de l’Environnement Nancéien
ccarra National
ccarra Lorraine
collectif la Heide

Photo : CC BY-NC-SA 2.0 SkyTruth
via flickr.

Notes

[1La France s’était engagée à sortir progressivement du pétrole et du gaz, et à ne plus délivrer de permis d’exploration d’hydrocarbures sur le sol Français.

[2Le gaz de couche se trouve dans les veines de charbon non exploitées et est difficilement accessible. Son extraction nécessite l’utilisation de techniques non conventionnelles.