Agriculture

Accaparement de terres : le groupe Bolloré accepte de négocier avec les communautés locales

Agriculture

par Simon Gouin

Des paysans et villageois du Sierra-Leone, de Côte d’Ivoire, du Cameroun et du Cambodge sont venus spécialement jusqu’à Paris. Pour la première fois, le groupe Bolloré et sa filiale luxembourgeoise Socfin, qui gère des plantations industrielles de palmiers à huile et d’hévéas (pour le caoutchouc) en Afrique et en Asie, ont accepté de participer à des négociations avec les communautés locales fédérées en « alliance des riverains des plantations Bolloré-Socfin ». Sous la houlette d’une association grenobloise, Réseaux pour l’action collective transnationale (ReAct), une réunion s’est déroulée le 24 octobre, à Paris, avec des représentants du groupe Bolloré et des communautés touchées par ces plantations.

Ces derniers dénoncent les conséquences de l’acquisition controversée des terres agricoles, en Afrique et en Asie. Ils pointent notamment du doigt des acquisitions foncières de la Socfin qu’ils considèrent comme « un accaparement aveugle des terres ne laissant aux riverains aucun espace vital », en particulier pour leurs cultures vivrières. Ils dénoncent également la faiblesse des compensations accordées aux communautés et le mauvais traitement qui serait réservé aux populations. Les représentants africains et cambodgiens sont venus demander au groupe Bolloré et à la Socfin de garantir leur espace vital en rétrocédant les terres dans le voisinage immédiat des villages, et de stopper les expansions foncières qui auraient été lancées sans l’accord des communautés.

Interlocuteurs légitimes

« Nous sommes satisfaits que M. Bolloré assume ses responsabilités, explique Emmanuel Elong, représentant camerounais de l’Alliance des riverains. Les accaparements de terres sont un problème global et des négociations globales sont nécessaires. Nous attendions beaucoup de la rencontre du 24 octobre qui est une première historique. » Entre 2011 et 2014, les surfaces plantées par la société Socfin, dont le groupe Bolloré est l’actionnaire principal, ont augmenté de 24%, passant de 87 303 à 108 465 hectares.

Finalement, des représentants du groupe Bolloré étaient bien là, en particulier Marie Annick Darmaillac, secrétaire générale adjointe du groupe. Mais la Socfin n’était pas représentée. « L’absence des représentants de cette société, dont la présence était pourtant annoncée, a cependant semé le doute sur le sérieux des intentions du groupe français qui se présentait jusque-là comme « facilitateur de dialogue » entre les deux parties », commente le ReAct. Une absence également regrettée par les membres de l’alliance. « Nous n’avons pas obtenu tout ce que nous demandions mais la bonne nouvelle c’est que le dialogue a commencé », a déclaré Shiaka Musa Sama, du Sierra-Leone, au journal Jeune Afrique, à la sortie de la conférence. « Nous qui avons été traités en criminels, nous sommes désormais considérés comme des interlocuteurs légitimes. » Une nouvelle réunion devrait avoir lieu en février prochain.

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