Pétition

Pas de quarantaine pour la démocratie

Pétition

par Collectif

Partout en Europe, la menace épidémique devient une excuse pour limiter les libertés. En France plusieurs mesures d’exception adoptées le 19 mars sont très controversées. En Hongrie, le gouvernement de Viktor Orbán vient de démettre le Parlement de ses pouvoir et donne au Premier ministre la possibilité de gouverner par décrets. Des élus européens et des activistes appellent à l’action.

La pandémie de coronavirus appelle une réponse urgente et ambitieuse. Des mesures doivent être prises pour sauver des vies et protéger l’économie. Mais la démocratie doit également être protégée pendant la pandémie ! Toutes les mesures d’urgence prises par les gouvernements doivent respecter les procédures démocratiques, la transparence et l’État de droit. En particulier, lorsque de sévères limitations aux libertés fondamentales sont imposées, cela doit être fait par les majorités démocratiques les plus larges possibles.

Malheureusement, certaines mesures prises par les gouvernements européens n’ont rien à voir avec la lutte contre le virus. Elles visent plutôt à lutter contre les critiques, l’opposition ou la liberté d’expression. Les gouvernements ultra-conservateurs d’Europe ont utilisé la lutte contre le Covid-19 comme un écran de fumée. Ils poussent à l’adoption de lois et de règlements qui suspendent le pouvoir des parlements démocratiquement élus. Cela fait taire l’opposition et suspend les droits humains fondamentaux comme la liberté de la presse. Il existe un grave danger que les décisions d’urgence transforment les démocraties européennes en systèmes autocratiques.

En Hongrie, une loi prévoit cinq ans de prison pour les journalistes

Car ces exemples de dérives autocratiques constituent une menace pour la démocratie et l’État de droit. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán impose ainsi un état d’urgence qui suspend le Parlement pour une durée indéterminée. Cela lui permet de gouverner par décret et de suspendre les élections. La loi adoptée en Hongrie punit également les "fausses nouvelles" et le « discours alarmistes » sur le coronavirus de peines pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison. Cette nouvelle loi pourrait bien être utilisée contre les journalistes critiques. La majorité des deux-tiers qu’a le parti d’Orban au Parlement hongrois a adopté cette loi le lundi 30 mars.

Lorsque le gouvernement polonais a annoncé un état de « menace épidémique », tous les candidats à la prochaine élection présidentielle ont suspendu leur campagne, sauf le candidat du gouvernement. Le gouvernement refuse de reporter les élections. Le président sortant Duda profite de la situation pour s’assurer un avantage dans le scrutin. Le gouvernement a également modifié la loi électorale moins de six mois avant les élections, violant la constitution polonaise.

« Il est sérieusement à craindre que Viktor Orbán essaie de transformer le pays en véritable dictature »

Les activistes des sociétés civiles polonaise et hongroise ont vivement critiqué ces mesures, qui conduiraient à des systèmes politiques autoritaires. En Hongrie, il est sérieusement à craindre que Viktor Orbán essaie de transformer le pays en véritable dictature.

À la lumière de ces développements, nous exigeons que toutes les mesures d’urgence prises par les États membres de l’Union européenne doivent avoir une date de fin, tout ne pouvant être prolongées si nécessaire. Et les mesures doivent permettre aux journalistes et aux parlements d’exercer leurs fonctions de contrôle démocratique. La Commission européenne doit prendre une position claire contre l’utilisation abusive de la crise du coronavirus pour des prises de pouvoir par des gouvernements autoritaires. Le contrôle parlementaire sur les actions du gouvernement hongrois étant suspendu, la Commission européenne devrait cesser de verser des fonds européens au gouvernement de Budapest. Les fonds de l’UE devraient plutôt être distribués directement par la Commission. Les organisations de la société civile et la presse ne doivent pas être limitées dans leur travail. Elles sont un élément essentiel de nos sociétés démocratiques.

La pétition est en ligne ici.

Premiers signataires :
Daniel Freund, député européen (Verts, Allemagne)
Lara Wolters, députée européenne (sociale-démocrate, Pays-Bas)
Guy Verhofstadt, député européen (libéral, Belgique)
Petri Sarvamaa, député européen (chrétien-démocrate, Finlande)
Ramona Strugariu, députée européenne (libérale, Roumanie)
Mikuláš Peksa, député européen (Parti pirate, République tchèque)
Terry Reintke, député européen (Verts, Allemagne)
Stelios Kouloglou, député européen (Gauche unie européenne, Grèce)
Moritz Körner, député européen (libéral, Allemagne)
Pascal Durand, député européen (LREM, France)
Gabriele Bischoff, députée européenne (sociale-démocrate, Allemagne)
Sergey Lagodinsky, député européen (Verts, Allemagne)
Tiemo Wölken, député européen (social-démocrate, Allemagne)
Viola von Cramon-Taubadel, députée européenne (Verts, Allemagne)
Franziska Brantner, députée (Verts, Allemagne)
Helmut Scholz, député européen (Gauche unie européenne, Allemagne)
Margarida da Silva, Corporate Europe Observatory
Alberto Alemanno, Professeur à HEC Paris
Helen Darbishire, Access Info Europe
Jamila Schäfer, Verts allemands
Domenèc Ruiz Devesa, député européen (social-démocrate, Espagne) Fabio Massimo Castaldo, député européen (Cinq étoiles, Italie)

Photo : CC European People’s Party via flickr.