Marketing écolo

Votez pour le prix Pinocchio

Marketing écolo

par Ivan du Roy

Grâce à une initiative de l’association Les Amis de la Terre, participez à élire la multinationale dont le discours plein de bons sentiments vous semble le plus mensonger. Il y a malheureusement l’embarras du choix.

Les Amis de la terre décerneront le 16 décembre le prix du plus gros menteur à trois multinationales hexagonales. Depuis quelques années, les entreprises cotées en bourse multiplient les références au « développement durable » ou à leur « responsabilité sociale » dans leurs rapports annuels destinés aux actionnaires. La loi « NRE » sur les nouvelles régulations économiques, votée en 2001, les oblige à y inclure des critères non financiers. La vague verte, la pression de l’opinion, puis le Grenelle de l’environnement ont fait le reste. Problème : aucun cadre n’existe pour les contraindre à respecter leurs beaux discours. Ni les ONG, ni les syndicats, n’ont les moyens d’aller vérifier sur le terrain la réalité de telle action en faveur de la protection de l’environnement ou de l’intégration des « minorités visibles ». Le magazine L’Expansion a cependant consacré un dossier en novembre sur ces « bluffeurs du CAC 40 », pointant du doigt Alstom, Alcatel-Lucent et LVMH.

Dix entreprises championnes en matière d’esbroufe ont été « nominées » par Les Amis de la Terre dans trois catégories. Les droits humains : Suez, Louis Dreyfus, Société générale et Alstom. L’environnement : Total, Areva, BNP-Paribas et Crédit Agricole. Et le Greenwashing : encore Areva et Total ainsi que Renault et le groupe CNIM (Constructions industrielles de la Méditerranée) pour son soutien aux incinérateurs. L’organisation écologiste invite chacun à voter pour l’un de ces imposteurs surle site du Prix Pinocchio : « Qui ment ? Qui n’a de vert que la couverture de son rapport de développement durable ? Aidez-nous à relancer le débat public pour que les entreprises assument leurs responsabilités », proposent les écolos

Un petit texte décrit les raisons pour lesquelles chaque multinationale a été choisie. Ainsi, le leader du nucléaire Areva fait la promotion de son « avenir sans CO2 », ce qui est faux. Un kilowatt produit par une centrale nucléaire émet moins de CO2 qu’un kilowatt produit par une centrale au gaz, mais en émet quand même. Sans oublier que l’avenir selon Areva est peuplé de déchets radioactifs et que le meilleur moyen de réduire les émissions de CO2 est d’économiser l’énergie. Autre exemple : le groupe français Louis Dreyfus (propriétaire de l’Olympique de Marseille) est, au Brésil, le deuxième plus gros producteur de sucre et d’éthanol, carburant issu de la canne à sucre. Il s’apprête à y supprimer 10 000 emplois après avoir exploité dans des conditions proches de l’esclavage des centaines d’indiens guaranis. Enfin, certaines banques financent des grands projets dangereux pour les populations avoisinantes et l’environnement. Le Crédit Agricole a ainsi investi plusieurs centaines de millions d’euros dans une usine de pâte à papier en Uruguay, jugée très polluante notamment à cause de l’utilisation massive de chlore… « Les multinationales profitent de vides législatifs pour mener leurs activités au détriment du respect des droits sociaux, sociétaux, ou de l’environnement dans les pays du Sud », critiquent Les Amis de la Terre. Rappeler certaines vérités cachées par les spots de publicité ne peut pas faire de mal.