Réchauffement

Une feuille de route alternative pour les négociations sur le climat

Réchauffement

par Agnès Rousseaux

Dans six mois, la communauté internationale se réunira à Copenhague pour discuter du réchauffement climatique, et prendre des mesures pour réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre. Plusieurs ONG ont publié un projet de traité qui propose une série de dispositifs plus contraignants que ceux prévus par les accords de Kyoto.

Les experts des organisations non gouvernementales travaillant sur les changements climatiques viennent de publier une proposition de traité, en prévision des négociations de Copenhague de décembre prochain [1]. Ce document de 160 pages est l’aboutissement d’un an de concertation entre associations de plusieurs pays. Il a été remis aux négociateurs des 192 États qui participeront au Sommet de Copenhague.

Il constitue un texte légal complet, avec les mesures nécessaires pour rester en deçà des 2°C d’augmentation, c’est-à-dire pour éviter des dérèglements mettant en péril la planète. Ce traité fixe comme objectif une réduction globale des gaz à effet de serre (GES) de 80% d’ici 2050, incluant une diminution de 95% des GES pour les pays industrialisés. Le texte soumet à la communauté internationale plusieurs propositions :

 Le budget carbone annuel pour l’ensemble des sources de gaz à effet de serre (à l’exclusion de ceux considérés par le Protocole de Montréal). D’ici à 2020 ce budget ne devrait pas dépasser 36.1 Gt de CO2, ramenant les émissions à leur niveau de 1990 et devrait être réduit à 7.2 en 2050, autrement dit à -80% par rapport aux niveaux de 1990.

 Une proposition de nouvelle institution - le Comité climat de Copenhague - pour gérer les processus de réduction des émissions, l’adaptation et la protection des forêts dans le cadre du nouveau traité mondial.

 L’enregistrement des plans d’action à long terme pour les pays industrialisés (Plans d’action zéro carbone) et pour les pays en développement (Plans d’action sobres en carbone).

 Des engagements contraignants pour les pays nouvellement industrialisés comme Singapour, la Corée du Sud et l’Arabie Saoudite en accord avec le principe de la Convention de responsabilité commune mais différenciée et de capacités respectives.

Les ONG demandent la mise en place par chaque pays d’un Plan d’action zéro carbone. Elles exigent la refonte totale du Mécanisme de développement propre (MDP), qui permet aux pays du Nord d’obtenir des droits à polluer en soutenant des projets peu producteurs de CO2 dans les pays les moins avancés. Un système qui a largement montré ses effets pervers. Enfin, le traité proposé par les ONG met l’accent sur la nécessité d’augmenter de façon conséquente les financements d’aide aux pays les moins avancés pour réaliser la transition vers un développement sans carbone.

Les réunions internationales de préparation du Sommet de Copenhague, dont la dernière s’est tenue à Bonn (Allemagne) au début du mois du juin, montrent que l’on est encore loin de cet accord idéal. Barack Obama continue de revoir à la baisse ses ambitions, et n’a réussi que de justesse à faire valider son projet de loi sur le climat par la Chambre des Représentants le 26 juin dernier. Le Mémorandum de la France pour le climat, présenté la semaine dernière aux partenaires européens lors du Conseil des ministres de l’environnement, présente selon le Réseau Action Climat des insuffisances notoires. La France ne répond pas à la question de la solidarité financière entre pays les moins avancés et pays riches, point crucial de la négociation. Elle est également peu ambitieuse sur le transfert de technologies. Enfin, en prônant le recours avant 2020 aux marchés carbone pour lutter contre la déforestation, elle marque un recul par rapport aux textes de compromis européens.

Espérons que dans les prochains mois, les États s’appuieront un peu plus sur les propositions des ONG, pour que des décisions ambitieuses soient prises lors de la bataille décisive qui se jouera à Copenhague.

Le résumé du projet de traité proposé par les ONG

Notes

[1Le traité a été réalisé par Greenpeace, le WWF, IndyACT, la Ligue des activistes indépendants, Germanwatch, la Fondation David Suzuki, le Centre national écologique d’Ukraine et des experts individuels du monde entier.