CAC 40

Technip : une prime de départ de 14 millions et une lourde ardoise pour le climat

CAC 40

par Olivier Petitjean

Une prime de départ de 14 millions d’euros : c’est ce que va toucher l’ingénieur lyonnais Thierry Pilenko, ancien PDG de l’entreprise parapétrolière Technip, qui quitte ses fonctions suite à la fusion avec le groupe états-unien FMC. L’ex PDG cumule l’équivalent d’une année de rémunération fixe, soit 2 millions d’euros, une clause de non concurrence de 2 millions d’euros, plus 10 millions d’euros d’actions gratuites, selon les informations révélées par BFM. L’annonce fait tache alors que le groupe TechnipFMC affiche 1,9 milliard de dollars de pertes en 2018.

Comme nous l’avions révélé dans notre « véritable bilan annuel des grandes entreprises françaises », le nouveau patron de TechnipFMC, Doug Pferdehirt, était en 2017 le mieux payé du CAC40 avec plus de 10,5 millions d’euros de rémunérations (lire Les patrons du CAC40 ont gagné en moyenne 4,68 millions d’euros en 2017). Thierry Pilenko, son numéro 2, n’était déjà pas loin derrière.

En additionnant dividendes et rachats d’actions, TechnipFMC était aussi en 2017 l’entreprise du CAC40 la plus généreuse envers ses actionnaires. Elle leur a versé plus de deux fois ses bénéfices pour l’année (lire Dividendes : les actionnaires ont coûté 55 milliards au CAC40 en 2017).

Pendant qu’actionnaires et dirigeants engrangent, les salariés encaissent

Du côté des salariés et de leurs représentants, le tableau est tout autre. Beaucoup estiment que la fusion s’est faite au détriment des intérêts français, et que le départ de Thierry Pilenko ne fait qu’officialiser le passage de l’entreprise sous pavillon américain. Les mauvais résultats de Technip et les réorganisations en série semblent avoir entraîné - déjà avant la fusion - une vague de souffrance au travail au niveau du siège, avec plusieurs suicides. Syndicats et directions s’écharpent sur la prévention des risques psycho-sociaux. Plusieurs milliers d’emplois devaient être supprimés au niveau du groupe, dont 700 pour le seul siège parisien [1].

La fusion entre Technip et FMC avait été vendue comme une opération entre deux groupes égaux et un moyen de créer un « champion » capable de résister à la baisse des cours du pétrole et de faire face à la concurrence mondiale. Comme souvent, l’opération semble s’être faite faite au bénéfice exclusif des actionnaires et des dirigeants.

Pourtant, le premier actionnaire de TechnipFMC reste... l’État français, à travers Bpifrance et l’Institut français du pétrole, à l’origine de la création de Technip dans les années 1950. Comme dans le cas de Renault, l’État actionnaire semble ne pas pouvoir – ou ne pas vouloir – imposer effectivement des limites aux rémunérations patronales (lire notre article).

Technip a également bénéficié du soutien de l’État sous forme de garanties de crédit, pour plusieurs autres projets, dont le complexe gazier Yamal LNG en Russie avec Total (lire notre enquête) ou encore la plateforme Coral LNG au large du Mozambique (voir ici). Valait-il vraiment la peine que le gouvernement français renie ainsi ses engagements climatiques en finançant ces projets d’énergies fossiles néfastes pour le climat ?

Olivier Petitjean

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Photo : Damien Roué CC via flickr