Logement

Parlementaires de droite et macronistes s’accordent sur une loi anti-droit au logement

Logement

par Rachel Knaebel

Une commission de quatorze députés et sénateurs a finalisé un accord sur la loi sur le logement, baptisée Elan (« évolution du logement, de l’aménagement et du numérique »). Cette commission mixte parlementaire a confirmé plusieurs des mesures ajoutées à la loi lors de son passage au Sénat : des mesures qui vont pénaliser les plus précaires.

Occupants sans titre : fin de la trêve hivernale

Le texte final supprime, pour les occupants sans titre d’un logement, le délai de deux mois entre le commandement de quitter les lieux et la mise en œuvre effective de l’expulsion. Les occupants sans titres ne bénéficieront plus de la trêve hivernale, et pourront donc être mis à la rue pendant l’hiver, au prétexte de « la lutte contre les squats ». L’association Droit au logement (Dal) craint que cette mesure soit appliquée très rapidement à toutes les occupations de sans-logis en cours accompagnées par le Dal, ainsi qu’aux locataires au noir qui n’ont pas de contrat de location, et aux victimes de marchands de sommeil.

La commission a aussi confirmé la mesure ajoutée par les sénateurs qui va permettre aux bailleurs de résilier le contrat de location de toute une famille si l’un des membres a été condamné pour trafic ou détention de stupéfiants. En dix ans, avant même cette loi, les expulsions locatives ont progressé de 41 %, atteignant les 15 000 mises à la rue en 2016, selon la Fondation Abbé Pierre.

Logements accessibles en cas de handicap : « 80 % de discrimination »

La commission, présidée par la sénatrice Sophie Primas (LR, Yvelines), a également entériné une réduction drastique du nombre de logement neufs qui seront accessibles aux personnes en situation de handicap. Aujourd’hui 100 % des logements neufs qui se trouvent en rez-de-chaussée ou dans les immeubles à partir de quatre étages doivent être accessibles. L’Assemblée nationale avait choisi de réduire ce taux à 10 %. Le Sénat proposait 30 %. La commission a opté pour 20 %, comme s’il s’agissait d’un marchandage d’épiciers. « Ils ont décidé 80 % de discrimination, a réagi le Collectif pour le droit au travail des handicapés et l’égalité des droits (CDTHED). D’un trait de plume, la CMP et le gouvernement nous replongent 43 années en arrière, avant que la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 ne pose le principe de l’obligation d’accessibilité des logements neufs en abandonnant le principe obsolète des quotas », déplore aussi le collectif.

« La loi Elan constitue l’attaque la plus violente depuis 32 ans — et loi Méhaignerie — menée par un gouvernement contre le logement des classes populaires : elle s’attaque à leur statut, à leurs conditions de logement, à l’accessibilité financière, à la qualité des logement produits, au dispositif général du logement social », ajoute Droit au logement. La loi Elan ouvre aussi la voie à une large privatisation du logement social public et donc à une réduction du nombre de logement à loyers modérés disponibles. « La loi Elan, forte de 270 articles n’en contient aucun faisant progresser le droit au logement », conclut le Dal. Cela dans une indifférence quasi générale. Un nouveau vote sur la loi telle qu’elle est ressortie de la commission paritaire doit se dérouler prochainement devant les deux chambres du Parlement. La promulgation définitive du texte est prévue pour la mi-octobre.

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