Dérives industrielles

La ferme-usine des 1000 vaches dans l’illégalité, les opposants remobilisés

Dérives industrielles

par Sophie Chapelle

« Il y aura des sanctions. » C’est l’engagement pris le 10 juin par Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, concernant la ferme des « Mille vaches » dans la Somme. En cause, le dépassement du cheptel autorisé fixé à 500 vaches comme le stipule l’arrêté préfectoral du 1er février 2013 [1]. La réaction de Stéphane Le Foll fait suite à la publication 48 heures plus tôt, du témoignage d’un ex salarié de cette « ferme-usine » recueilli par le site Reporterre. Il atteste de conditions de travail désastreuses, d’un état sanitaire du troupeau catastrophique, et surtout de la présence de plus de 720 vaches laitières sur site.

« Toutes les naissances et mortalités, ainsi que les entrées et sorties, doivent être impérativement déclarées sous huitaine à l’administration, écrit le syndicat de la Confédération paysanne, dans une lettre ouverte à Stéphane Le Foll. En est-il autrement quand on est la 349e fortune de France (Michel Ramery, entrepreneur du BTP qui pilote le projet, ndlr)  ? » Dans la foulée, le ministre demande à la préfecture de la Somme de diligenter un contrôle sur le dépassement du volume de bovins. Le constat est sans appel : la ferme-usine compte 796 bêtes.

« Non à l’impunité de Ramery »

L’exploitation indique ne pas avoir voulu transgresser quoi que ce soit : « L’occasion s’est simplement présentée de récupérer un troupeau de 300 têtes, élevées dans les mêmes conditions que les nôtres », fait-elle savoir. « J’avais indiqué que si on devait dépasser les 500 vaches, il faudrait qu’il y ait à nouveau une enquête publique, réagit Stéphane Le Foll en Conseil des ministres. La demande n’ayant pas été faite, l’enquête n’ayant pas eu lieu, il y a eu là un manquement donc il sera sanctionné. J’applique toutes les règles et toute la loi. » Si le ministre se défend d’avoir « porté » ce projet d’élevage intensif, il n’a pour le moment pas précisé le type de sanctions auquel s’expose cette ferme-usine.

Outre la mise en demeure à l’encontre de Michel Ramery de régulariser expressément la situation du troupeau, la Confédération paysanne et l’association Novissen ont décidé de porter plainte pour dépassement de troupeau. Ces révélations interviennent à quelques jours du procès en appel de neuf syndicalistes de la Confédération paysanne. En septembre 2013, ils s’étaient introduits sur le chantier de la future ferme des 1000 vaches pour le stopper temporairement. Poursuivis pour dégradations, vols et recels aggravés, les neuf prévenus ont été condamnés un an plus tard à des amendes et des peines de prison avec sursis. Alors qu’ils comparaissent le 17 juin, la Confédération paysanne appelle à une mobilisation massive devant la cour d’appel d’Amiens « pour dire non à cette dérive industrielle de l’agriculture, non à la pénalisation de l’action syndicale et non à l’impunité de Ramery ».