#imagineLaGauche

Elisabeth, voisine de la Zad : « Être de gauche, c’est mettre fin aux violences policières et à leur impunité »

#imagineLaGauche

par Nolwenn Weiler

Qu’est-ce qu’être de gauche selon vous ? Y a-t-il encore du sens à se dire de gauche ? Comment voit-on la gauche du futur ? Quelles sont ses valeurs, ses idées, ses projets, ses défis ? #imagineLaGauche, c’est la série lancée par Basta!, pour comprendre, reconstruire, rêver, renouveler, mettre en débat… Salariés, chômeurs, retraités, étudiants, paysans, militants associatifs, syndicalistes, artistes, chercheurs, jeunes et moins jeunes, témoignent. Aujourd’hui, Elisabeth, ancienne salariée dans le secteur des assurances, voisine de la Zad de Notre-dame-des-Landes

Ce qui se passe sur la « zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes, est clairement de gauche. Dans la pratique quotidienne du « vivre ensemble », et dans le fait de n’exclure personne. Les gens qui y sont installés y cultivent l’échange et le partage au jour le jour, ce qui est assez rare dans notre société. Ce n’est pas facile, cela demande d’y accorder du temps, beaucoup d’énergie. Mais c’est nécessaire si on veut une société pacifiée. Quelque part, cela fait rêver. Et il n’y a pas grand monde qui nous fait rêver aujourd’hui. Ils ont aussi mis la préservation de l’environnement au cœur de leur lutte. Ce qui n’est pas le cas de la gauche au pouvoir. C’est grave, au regard de l’urgence climatique.

Contrôler la police

Beaucoup de choses graves se sont passées ces cinq dernières années. Les attaques contre le travail, avec une loi qui passe en force sans consulter le Parlement, m’ont beaucoup choquée, de même que la façon dont les mouvements sociaux ont été réprimés au printemps 2016. Voir des jeunes se faire maltraiter par la police – qui est censée nous protéger – m’a terriblement heurtée. Mais la violence policière a débuté dès les premiers mois du quinquennat de François Hollande, à l’automne 2012, quand les forces de l’ordre sont violemment intervenues ici, sur la Zad. Les blessures graves qu’ils ont infligées à des jeunes étaient scandaleuses ; de même que les destructions sauvages de beaucoup de leurs biens – cabanes, vélos, jardins, etc.

Cette violence et cette impunité n’ont pas cessé pendant cinq ans. Quand on entend l’IGPN prétendre que le viol de Théo était un accident, c’est catastrophique. Cela veut dire que l’on a des gens qui commettent des actes inacceptables, et qu’ils sont en plus couverts par l’autorité qui est censée les contrôler. Ce n’est pas possible. Comment ne pas comprendre que des gens qui n’ont rien à perdre deviennent violents et aient envie de tout casser ? Remettre la police à sa place, et s’assurer qu’elle soit contrôlée par une véritable justice, c’est vraiment une priorité.

Supprimer les inégalités

Autre urgence : faire en sorte que les richesses soient mieux partagées. Il y a des écarts indécents dans notre société, qu’il faut absolument lisser. Les jeunes sont, là aussi, très maltraités. J’ai deux enfants étudiants, qui ne s’en sortiraient pas si je ne les aidais pas financièrement. Ou alors difficilement. Beaucoup de leurs amis sont obligés de travailler pour se payer un toit. Où est l’égalité des chances dans ces conditions ? Mettre en place des aides pour les plus démunis, cela me semble urgent. Mais il faudrait que ce soit plus simple que le RSA, que tant de gens ne demandent pas, tellement les démarches sont compliquées ! Le mépris ne peut pas durer indéfiniment.

Quand on regarde vers les partis politiques, on est un peu en panne du côté des grands projets ; on a l’impression que les envies d’améliorer la qualité de notre vie ont été abandonnées. Il arrive pourtant que des gens au pouvoir s’attèlent à cette tâche difficile, mais indispensable. Prenons la réduction du temps de travail, ou bien la mise en place de la couverture maladie universelle : voilà des mesures de gauche qui mettent en avant le partage et la solidarité. La bataille que Christiane Taubira a menée en faveur du mariage pour tous va dans ce même sens ; de même que l’abolition de la peine de mort en 1981, dont je me souviens comme d’un moment très fort.

Propos recueillis par Nolwenn Weiler