Etat d’urgence

Convoqué au tribunal pour avoir distribué un tract anti-nucléaire

Etat d’urgence

par Sophie Chapelle

Un militant anti-nucléaire est convoqué au tribunal de Valence (Drôme) le 24 mars. Son délit ? « L’organisation d’une manifestation interdite sur la voie publique [et] sans déclaration », selon la convocation que Basta! a consultée. La manifestation visée s’était tenue le 28 novembre 2015 à Valence à l’appel de plusieurs organisations locales « pour peser sur la COP 21 », lors de la conférence sur le climat organisée à Paris, relate Dominique, le militant poursuivi. « Les manifestations prévues, notamment à Lyon, ont été interdites (dans le cadre de l’état d’urgence, ndlr), mais nous avons décidé de maintenir le rassemblement. » D’autres villes ont aussi fait le choix de se rassembler à cette date, comme à Paris où des milliers de personnes ont organisé une immense chaine humaine.

Parties de la gare de Valence, une cinquantaine de personnes organisent alors une distribution de tracts dans le centre-ville. Celui du réseau Sortir du nucléaire Drôme-Ardèche (SDN 26-07) s’intitule « Côtes du Rhône ou la Vallée de l’atome » et rappelle que ces deux départements comptent à eux seuls dix réacteurs nucléaires. « Si le pire devait arriver (catastrophe naturelle, acte de malveillance, perte de contrôle des exploitants), 2,6 millions de personnes verraient leurs vies anéanties », prévient le tract [1]. « Il y avait aussi des partis politiques, notamment le parti socialiste, qui distribuaient des tracts dans le cadre des élections régionales », détaille le prévenu à Basta!. « La police nous a sommés de partir et nous avons refusé invoquant le fait que nos organisations distribuaient, chaque semaine le samedi, une information aux population. »

« Une façon d’intimider le mouvement social »

La police prend alors le nom d’un « responsable ». Le militant du réseau SDN 26-07 est convoqué en janvier 2016 au commissariat sur demande du procureur de la République. Il devra finalement comparaitre au tribunal pour « un simple rappel à la loi ». « Le procureur a renoncé à poursuivre, gêné sans doute par la présence d’autres distributions de tracts le même jour, souligne le militant. Ce rappel à la loi diffère d’une sanction, observe t-il. Mais c’est une façon d’intimider le mouvement social. » L’audience, initialement prévue le 10 mars, a été reportée au 24 mars à 11h au tribunal correctionnel de Valence.

Un appel à rassemblement devant le tribunal soutenu par des associations, partis politiques et syndicats est lancé [2].« Plus de 3000 perquisitions administratives, plus de 400 assignations à résidence, de multiples interdictions de manifester : pour quel résultat ? », interrogent les signataires. « 23 délits d’apologie d’actes de terrorisme et 6 saisines du parquet antiterroriste : autant d’affaires qui auraient pu être traitées par la justice sans l’état d’urgence. En revanche, combien d’entraves à l’activité militante ? Combien d’intimidation envers des militants associatifs, syndicaux, politiques ? Combien de contrôles au faciès ? Combien de dérapages racistes ? » Un collectif drômois contre l’état d’urgence a été créé, qui s’inscrit dans le mouvement des conseils de vigilance citoyenne qui essaiment en France.

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