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Vaucluse : des paysans « sans terre » contre la spéculation foncière

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par Sophie Chapelle

Nous ne sommes pas au Brésil, où le mouvement des « sans terre » occupe régulièrement des parcelles appartenant à de grands propriétaires terriens, mais dans le Vaucluse. Une centaine de paysans et de citoyens ont décidé d’agir contre la spéculation foncière le 17 avril à Lauris, à une soixantaine de kilomètres d’Avignon. Ils y ont labouré 4 hectares de terres agricoles laissés en friche par leur propriétaire depuis plus de cinq ans. Avant de recouvrir le terrain de trois grandes lettres, « ZAP » pour « zone agricole protégée ». « Des milliers d’hectares sont confisqués à l’agriculture par des propriétaires privés et laissés en friche à des fins de spéculation » dénoncent la Confédération paysanne et l’Association régionale pour le développement de l’emploi agricole et rural (ARDEAR) de Provence-Alpes-Côtes d’Azur. Qui rappellent que ces 4 hectares de terres « détournés de l’agriculture équivalent à 160 quintaux de blé ou 2 000 bottes de luzerne à l’année ». D’après ces organisations, acheter des terrains à bas prix pour les faire ensuite classer constructibles et encaisser la plus-value serait devenue une pratique courante.

Le maire de cette commune de 3 700 habitants a déclaré ne pas cautionner cette opération coup de poing. Il reconnaît néanmoins « les difficultés et souffrances rencontrées par les jeunes paysans pour trouver des terrains et travailler ». Quant au propriétaire du terrain, il s’est dit « choqué » par cette action dont il n’a pas été préalablement informé. Ce terrain est situé au cœur du Lubéron, une zone dans laquelle 30% des exploitations ont disparu en 10 ans et où la surface agricole a régressé de 17%. La région PACA perd à elle seule 9 000 hectares de terres agricoles par an, sur 78 000 hectares à l’échelle nationale. Alors que la loi d’avenir agricole doit passer en seconde lecture à l’Assemblée nationale (voir notre décryptage), la Confédération paysanne propose dans un amendement, d’augmenter à 25 % la taxation des plus-values réalisées par la vente de terrains agricoles devenus constructibles. L’enjeu, « mettre un frein au changement de destination des sols agricoles et doter les paysans du droit d’accéder au foncier ». Dans un reportage vidéo des Chroniques marseillaises, un paysan conclut : « S’il faut faire ce type d’action chaque mois, on le fera. »