Energie

Gaz de schiste : mobilisation écologique inédite en Algérie

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par Sophie Chapelle

« Halte à l’exploitation immédiate du gaz de schiste », peut-on lire dans les rues d’Alger le 24 février. Mais aussi dans d’autres grandes villes comme Oran, Tamanrasset, Boumerdès, Batna et Bouira. « La honte ! La honte ! Le gouvernement a cédé le Sahara pour quelques dollars ! » Cette mobilisation nationale contre les gaz de schiste coïncide avec le 44e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en Algérie. L’initiative, organisée par plusieurs formations de l’opposition, a été lancée en signe de solidarité avec les populations des provinces sahariennes qui s’opposent à l’exploration et à l’exploitation des gaz de schiste.

A In Salah, la ville la plus proche des lieux de forage, des manifestations pacifiques et des blocages de routes ont lieu sans discontinuer depuis deux mois pour exiger l’arrêt des explorations (notre précédent article). Le mouvement citoyen d’opposition pointe en particulier les risques de pollution des eaux et de l’air liés à l’usage de la fracturation hydraulique. La semaine dernière, la société civile d’In Salah a déposé à la présidence, à Alger, une demande de moratoire. Le collectif souligne que « les populations du Sud qui ont, par le passé, connu les affres des essais nucléaires et d’armes chimiques, en sont traumatisées ». Et précise que « l’avenir énergétique de l’Algérie n’est pas dans les schistes mais dans l’optimisation de nos ressources conventionnelles, le développement des énergies renouvelables, dans le mixte énergétique et dans les économies d’énergies ».

Mais le gouvernement n’entend pas céder à la pression. Dans un message lu le 24 février en son nom par un conseiller à Oran, le président Abdelaziz Bouteflika a déclaré qu’il fallait « fructifier » et « tirer profit » de tous les hydrocarbures dont le gaz de schiste. Les mobilisations ont par ailleurs donné lieu à des interpellations par la police, omniprésente. Une vingtaine de personnes ont été arrêtées à Alger où les manifestations sont interdites depuis 2001. Le journal El Watan comptabilise une dizaine d’interpellations de militants à Boumerdès. La répression l’emportera t-elle sur cette mobilisation écologique inédite en Algérie ? Selon Hocine Malti, ancien cadre de la Sonatrach, « les citoyens d’In Salah sont déterminés à se battre jusqu’au bout. » Certains commencent même à envisager une grande marche qui partirait des villes du Sud pour rejoindre Alger.

@Sophie_Chapelle

Photo : Mohammed Djemouai / facebook

Pour aller plus loin : De l’indépendance au gaz de schiste, une Algérie malade de ses hydrocarbures ?