Climat

2000 activistes bloquent le quartier d’affaires de La Défense contre « la République des pollueurs »

Climat

par Sophie Chapelle

Face à l’urgence climatique, ils considèrent que les marches ou les grèves symboliques de lycéens et d’étudiants ne suffisent plus. Depuis ce matin, 19 avril, 2030 personnes bloquent les tours de Total, de la Société Générale, d’EDF, sur le parvis de la Défense à Paris, ainsi que le ministère de la Transition écologique et solidaire. Des bus ont été affrétés de toute la France pour acheminer les militants. Les organisations écologistes qui en sont à l’initiative [1] dénoncent le fait que « la politique climatique de la France se décide là où siègent les entreprises qui saccagent la planète ». « La complicité systématique entre ces entreprises, notre Président et notre gouvernement paralyse le changement politique dont nous avons besoin pour répondre à l’urgence climatique. Nous répondons en bloquant cette République des Pollueurs. »

Les trois multinationales bloquées n’ont pas été choisies par hasard. Total, cinquième plus grande compagnie mondiale de pétrole et de gaz, est le 19e plus gros pollueur mondial, et affiche sa volonté d’aller forer toujours plus loin et plus profond. Le gouvernement facilite la tâche du pétrolier : le 23 octobre dernier, il lui a accordé une licence pour procéder à des forages offshore au large de la Guyane. La France a pourtant officiellement voté la fin de l’exploitation des hydrocarbures sur son territoire, y compris d’outre-mer, d’ici 2040...

La Société générale continue pour sa part de financer massivement les énergies sales fortement émettrices de gaz à effet de serre, tandis que son soutien aux énergies renouvelables patine. Quant à EDF, elle n’a jamais cessé de défendre l’atome depuis un demi siècle. Aujourd’hui encore, le coût du nucléaire et les investissements qui y sont engloutis constituent l’une des causes du retard français en matière d’énergies renouvelables. Lors de la préparation de la loi sur la transition énergétique, l’entreprise est parvenue à noyauter totalement le débat (notre enquête) et à retarder considérablement les objectifs de sortie de l’atome et de fermeture de la centrale de Fessenheim. Initialement prévue pour 2025, la réduction à 50% de la part d’électricité issue de l’énergie nucléaire (72% actuellement) a été reportée par le gouvernement à 2035.

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« Nous sommes prêts à aller en prison pour défendre les générations futures »

L’action de désobéissance civile à Paris s’inscrit dans la « semaine internationale de rébellion » qui se déroule depuis le 15 avril dans 80 villes du monde à l’initiative du mouvement Extinction Rebellion. Les manifestations les plus importantes ont eu lieu à Londres où plusieurs milliers d’activistes ont bloqué ces derniers jours cinq lieux majeurs du centre de la capitale anglaise. « Notre idée, c’est l’escalade des perturbations. Si nous parvenons à stopper le trafic automobile des jours durant, nous allons finir par provoquer une crise et le gouvernement n’aura plus d’autre choix que d’agir », confiait l’une des organisatrices du mouvement. Depuis le début du blocage à Londres, au moins 400 militants ont été arrêtés.

Au Royaume-Uni, Extinction Rebellion porte trois revendications : la proclamation d’un « état d’urgence climatique et écologique », l’élaboration d’un plan d’actions pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2025 et la création d’« assemblées de citoyens » supervisant cette transition. En France, « nous sommes prêts à prendre des risques juridiques, jusqu’à aller en prison, pour défendre notre survie et les générations futures », assure Pauline Boyer de l’association ANV COP21, déjà criminalisée pour des actions de décrochage de portraits d’Emmanuel Macron.

Photos : © Greenpeace

Notes

[1ANV COP21, Greenpeace et Les Amis de la Terre, en partenariat avec AEFJN, Bizi !, Extinction, Il est encore temps, ZEA