Justice climatique

« Les grandes entreprises polluantes du Nord ont une responsabilité historique »

Justice climatique

par Agnès Rousseaux, Sophie Chapelle

Le Sommet de Copenhague vient de s’ouvrir. Entre les annonces officielles de la conférence onusienne et les mouvements sociaux, le fossé se creuse sur les attentes. Entretien avec une responsable de l’ONG "Focus on Global South", pour qui le sommet, malgré sa « rhétorique creuse » est « une immense opportunité pour changer vraiment la manière de penser les questions écologiques ».

Yvo de Boer, le secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (UNFCCC, pour faire simple...) a rappelé, le 6 décembre 2009, veille de l’ouverture du Sommet, les principaux enjeux des négociations. Pour que « la mise en œuvre de la Convention soit entière, efficace et suivie dès maintenant et au-delà de 2012 », il a énoncé la nécessité d’objectifs chiffrés de réduction pour les pays développés et la limitation de l’augmentation des émissions des pays en développement. Le secrétaire général a également réaffirmé le besoin d’un fonds d’aide obligatoire à l’adaptation dès 2012 accompagné d’un transfert de technologies. Enfin, Yvo de Boer a pointé la nécessité d’un soutien urgent aux pays en développement préconisant l’intégration des forêts dans les mécanismes de compensation. Sous le nom de REDD+, ce mécanisme vise à comptabiliser les émissions qui n’auront plus lieu grâce à l’arrêt de déforestations ainsi que les quantités de CO2 que les forêts sont capables de capter.

Basta! a interrogé Nicola Bullard quelques jours avant l’ouverture des négociations. Membre de Focus on the Global South, une ONG basée à Bangkok, et active dans le réseau Climate Justice Now !, Nicola Bullard revient sur les attentes que suscite le sommet de Copenhague. Pour elle, « la crise climatique est une conséquence du système économique qui est fortement basé sur la surconsommation et l’accumulation. A moins que nous changions la base du système économique pour le rendre plus soutenable et juste, nous ne pourrons pas résoudre la crise climatique. »

Pointant les limites des négociations actuelles, Nicola Bullard voit toutefois en Copenhague « une immense opportunité pour porter l’idée de la dette climatique et la construction du mouvement de la justice climatique ». Rencontre.

En quoi la "justice climatique" est-elle incontournable pour avoir une action efficace sur le changement climatique ?

« Copenhague peut permettre de mettre la pression pour un cadre moral, légal et historique plus fort, avec la justice et l’équité au centre. »

Les pays dits de l’Annexe 1 - les pays industrialisés - comptent beaucoup sur les mécanismes de compensation dont REDD+, pour atteindre leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de de serre. Quelles sont les raisons pour lesquelles le Réseau Climate Justice Now ! y est opposé ?

« Les grandes entreprises polluantes du Nord, qui ont une responsabilité historique, peuvent tout simplement continuer à polluer comme ils l’entendent et acheter simplement des crédits carbone sur les marchés, plutôt que de réduire leurs propres émissions. »

Comment mobiliser à Copenhague alors même que l’on se dirige dites-vous « vers une simple déclaration politique des dirigeants » ?

« C’est juste le commencement mais la mobilisation autour de Copenhague promet un puissant mouvement pour la justice climatique. »

Sophie Chapelle et Agnès Rousseaux