Sexisme

L’UMP, le parti qui n’aimait pas les femmes

Sexisme

par Sophie Chapelle

Le parti présidentiel demeure le cancre de la parité, loin derrière ses adversaires. En cinq ans, l’UMP a ainsi préféré payer 20 millions d’euros d’amendes pour violation de la loi que de permettre à des femmes d’être élues. Au PS, les militantes s’inquiètent aussi d’un retour de la « suprématie masculine ».

« Vous savez quel est le féminin de député ? Suppléante ! » Brigitte Kuster, maire UMP du XVIIe arrondissement de Paris, ne décolère pas. Alors qu’elle briguait la 4e circonscription pour les prochaines législatives, elle s’est vue écartée au profit d’un homme, Bernard Debré, député sortant élu dans le XVIe arrondissement. À Paris, sur 18 circonscriptions, cinq femmes seulement ont été adoubées par l’UMP… mais dans des circonscriptions perdues d’avance pour la droite.

Comme Rachida Dati, recalée par les instances de l’UMP face à François Fillon, Brigitte Kuster promet de mener la fronde. Elle maintiendra sa candidature, sans le soutien de son parti. Il est loin le temps où le candidat Nicolas Sarkozy, en 2006, posait comme objectif de dépasser les 30 % de candidates titulaires. Pour les élections législatives de 2012, seulement 28 % des candidats investis par l’UMP au plan national sont des femmes. À cause de ce choix, le parti devra payer 4 millions d’euros d’amende en 2012 pour non-respect de la loi sur la parité.

Ce n’est pas la première fois que l’UMP se révèle être un cancre en la matière. Aux élections cantonales de 2011, l’Observatoire de la parité avait pointé les bons et mauvais élèves. Europe Écologie-Les Verts, avec 35,8 % de candidates et 22,2 % de femmes élues, est le parti le plus paritaire, devançant le Parti communiste (31,2 % de candidates), suivis par le Front national (25,7 %) et le Parti socialiste (23,1 %). À la dernière place, on retrouve l’UMP, avec 18,6 % de femmes investies et 11,7 % d’élues. Déterminé, le parti présidentiel tient bon contre le partage du pouvoir entre hommes et femmes. Quoi qu’il lui en coûte. Entre 2007 et 2012, l’UMP a dû débourser 20 millions d’euros pour non-respect de la loi sur la parité.

Votée en 2000, cette loi prévoit des pénalités financières quand l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats et aux fonctions électives n’est pas respecté (à 2 % près). Si les partis sont obligés de présenter des listes paritaires pour les élections municipales, régionales et européennes, ce n’est pas le cas pour les élections législatives. L’UMP a donc préféré s’abstenir. Sachant que l’amende sera partiellement compensée par le financement public des partis ! Osons imaginer un système un brin plus coercitif : la suppression pure et simple des subsides publics aux partis qui ne respectent pas les dispositions légales. Difficile, sans doute, à faire adopter par une Assemblée nationale essentiellement masculine...

Lutter contre l’épidémie de barbes

Du côté du Parti socialiste, on promet, la main sur le cœur, de respecter la parité aux élections législatives de 2012. Mais certaines élues redoutent que cette parité ne soit que de façade (ça alors…). Si 50 % des investitures devraient bel et bien être réservés à des candidates, les circonscriptions dans lesquelles elles sont investies leur offrent peu de chance de l’emporter. 50 % de candidates ne signifiera donc pas 50 % de députées. Loin de là.

« À cet égard, la répartition des circonscriptions législatives dans le Val-de-Marne (94) pour les élections de juin 2012, est particulièrement éclairante sur les intentions réelles de la fédération en matière de parité », soulignent des élues PS dans une lettre ouverte. « Dans le Val-de-Marne, aucune des circonscriptions réservées aux femmes n’est gagnable. Aucune ? Aucune ! » Accorder les discours et les actes, pour respecter l’esprit de la loi en matière de parité, c’est un défi loin d’être gagné par le PS. A l’image d’un François Hollande déclarant le 2 mars : « Ce serait un bon principe que d’avoir autant d’hommes que de femmes dans un gouvernement ». Puis d’ajouter, « cela ne veut pas dire que les responsabilités seraient les mêmes ». Des femmes sous-secrétaires d’État, oui, mais des femmes ministres, c’est à voir...

Alors, combien de temps encore à se tenir la barbichette dans les instances de pouvoir ? Le collectif féministe La Barbe vient de lancer un « appel à soutien de la domination masculine » (sic). « Les fonds recueillis seront, par ordre de mérite, alloués aux partis qui, aux prochaines élections législatives, braveront cette loi (sur la parité, ndlr) scélérate », précise, toujours avec humour, le collectif. « En payant leur amende, vous contribuerez au maintien des Grands Hommes blancs aux postes de commande de l’État français. » Qu’on se rassure, le don en euros – pardon, en « érectiles », une monnaie fictive créée par La Barbe – n’engage à rien. En revanche, relayer leurs affiches aide à reprendre du poil de la bête.

Sophie Chapelle