Gilets jaunes

Lycéens et étudiants dénoncent aussi le « mépris » du gouvernement

Gilets jaunes

par Nolwenn Weiler

Les blocages de lycées ont repris tôt ce matin, un peu partout en France. « Nous ne voulons plus être les ignoré.es de ce quinquennat », avait lancé l’Union nationale lycéenne (UNL) ce 30 novembre, appelant à bloquer les lycées et à rallier le mouvement des gilets jaunes [1]. Rejoignant les revendications des gilets jaunes sur la question du pouvoir d’achat, les syndicats lycéens évoquent le coût des transports qui pèse sur le quotidien des élèves et les difficultés financières qui les empêchent parfois, tout simplement, de se nourrir correctement. Autre point de convergence : le mépris du gouvernement. « Plutôt qu’une oreille attentive, c’est un certain mépris qui a maintes fois été opposé aux aspirations de la jeunesse, que ce soit sur la mise en place de la plateforme Parcoursup, la réforme du bac ou les annonces concernant l’implantation de policiers dans les lycées. C’est ce mépris qui est l’élément déclencheur de toutes ces mobilisations, de cette réponse collective », renchérit Marouane Majrar, vice-président de la FIDL, interrogé par Marianne ce lundi 3 décembre.

Parcoursup, acte 2

Parmi les sujets que les lycéens aimeraient aborder : l’augmentation des bourses et les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur que Parcoursup a beaucoup renforcées. La mise en place de ce système, une plateforme internet sur laquelle les bacheliers enregistrent leurs vœux pour leur année post-bac, avait suscité un vaste mouvement étudiant au printemps dernier (voir ici). « La sélection a laissé des milliers de lycéens sans université au début de l’année scolaire, dénonce aujourd’hui l’UNL. La réforme de la voie professionnelle offre une main d’œuvre gratuite et docile au patronat. Notre droit à l’éducation est attaqué, notre droit à l’avenir est remis en doute, notre liberté de choix est entravée. » Soutenus par certains enseignants, les lycéens annoncent qu’ils ne reculeront pas. Ils espèrent être rejoints par d’autres secteurs d’activité comme celui des transporteurs. À Limoge, ce lundi, des agriculteurs ont rallié le rassemblement lycéen.

Samedi 1er décembre, il y avait aussi des étudiants dans les rues - notamment étrangers - pour demander l’annulation d’une brutale augmentation des frais d’inscription à l’université pour les « non-européens ». À compter de la rentrée 2019, ces frais passeront de 170 à 2770 euros en licence et de 380 à 3770 euros en master et doctorat. « Cette mesure vient renforcer les inégalités qui existent entre les étudiant.e.s français.e.s et étranger.e.s ainsi que la précarité subie par les étudiant.e.s étranger.e.s » ont dénoncé des organisations de jeunesse dans un appel à manifester le 1er décembre [2]. Samedi, dans certaines villes, comme à Lyon, les cortèges des étudiants ont rejoint ceux des gilets jaunes.

Vers une augmentation généralisée des frais d’insription ?

« Le seul le droit d’entrer dans une université française coûte [déjà] environ 2000 euros, précise un collectif d’étudiants non-européens [3]. Ce sont les frais minimums pour venir étudier en France, auxquels s’ajoutent ensuite ceux du logement, de la nourriture, du transport... De plus, pour la plupart d’entre nous le foyer fiscal n’est pas en France, nous n’avons donc accès ni aux bourses ni aux logements du Crous. »

« Cette première augmentation des frais d’inscription pour les étudiant.e.s étranger.e.s ouvre également la porte à des augmentations successives et généralisées des frais d’inscription » , poursuit le collectif d’associations qui comprend notamment le syndicat étudiant Unef et le syndicat lycéen Unel. Une crainte que soulève également Solidaires étudiants : « Il est évident que cette première annonce de l’augmentation des frais pour les étudiant.e.s étranger.e.s sert à préparer l’opinion à une augmentation généralisée des frais d’inscription avec pour conséquences à terme le renoncement aux études supérieures pour les plus démunis ou un surendettement massif pour ceux qui persisteraient. C’est exactement ce qui s’est passé au Royaume-Uni ». En Grande-Bretagne, l’idée de faire payer les étrangers a été initiée dès 1980 par Margaret Thatcher, puis amplifiée par Tony Blair et les gouvernements successifs. Aujourd’hui les étudiants britanniques paient l’éducation supérieure publique la plus chère du monde industrialisé et croulent sous les dettes.

Nolwenn Weiler

Photo : manifestation lycéenne, étudiante et enseignante le 12 novembre à Paris / © Serge d’Ignazio

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Notes

[1Lire ce tract sur la page FB du syndicat.

[2Liste des organisations qui ont appelée à manifester : MJCF - Jeunes Génération.s – Réseau Jeune du Parti de Gauche – FIDL – JOC – UNEF – UNL.

[3Détail des 2000 euros : cours de français et examen requis pour l’admission : 1000 euros ; procédures et ses traductions : 261 euros ; frais de dépôt du dossier sur Campus France : de 75 euros à 200 euros ; timbre fiscal pour l’obtention du titre de séjour – et pour son renouvellement : de 79 à 269 euros.