Démocratie

La mobilisation pacifique des Sénégalais

Démocratie

par Elise Picon

Contre toute attente, la journée d’élections de dimanche dernier, 26 février, s’est déroulée dans le calme au Sénégal. Malgré l’annonce d’un possible second tour, qui a fait retomber la pression, la société civile reste sur ses gardes. Des rumeurs de fraude courent en effet à travers le pays, et il n’est pas exclu que le Président sortant, Abdoulaye Wade, arrache une victoire illégale dès le premier tour.

Dimanche 26 février, il est 9 h, et les files d’attentes sont longues, dans les bureaux de vote du quartier Grand Yoff. Chacun attend patiemment, carte d’identité à la main, sous le regard attentif des observateurs de la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest). Lorsque les écoles sont trop petites, des tentes sont dressées pour accueillir tout les votants jusqu’à 18 h. La journée se déroule dans le calme. Un grand nombre de Sénégalais se sont rendus aux urnes. Le taux de participation élevé montre leur intérêt pour leur démocratie. Les manifestations du Mouvement du 23 juin et « Y’en a marre » ont incité les Sénégalais à voter massivement pour faire entendre leurs voix.

Malgré l’annonce non officielle d’un second tour électoral avec les candidats Abdoulaye Wade et Macky Sall, le suspens est là, jusqu’à la proclamation des résultats définitifs qui aura lieu en fin de semaine. D’ici là, plusieurs scénarios sont possibles. Les Sénégalais espèrent toujours que le « Vieux » se retire, laissant alors Macky Sall (2e position) et Mustapha Niasse (3e position) en lice. Ou alors plus désastreux, le Vieux gagne au premier tour grâce un système de fraude. On a entendu la coalition Macky 2012 accuser Wade d’avoir affrété un avion rempli de bulletins en direction de Matam, à l’est du pays. Cet avion aurait été stoppé à l’aéroport de Dakar.

L’impopularité de Wade

La fraude n’est pas exclue, selon les Sénégalais, qui ont perdu toute confiance en leur Président depuis qu’il a brigué un troisième mandat. Manifestations et émeutes n’ont pas suffi à le faire renoncer. Et il était plus prêt que jamais à s’accrocher au pouvoir comme un vieux dictateur. La situation a légèrement évolué depuis dimanche. Dans son propre bureau de vote, au point E à Dakar, le Président sortant, glissant son bulletin dans l’urne sous l’œil des caméras sénégalaises et internationales, s’est fait huer par la foule. Elle scandait en wolof « Wade dégage ». Le Vieux a subi une humiliation extrême, prenant la mesure de son impopularité actuelle.

Le lundi 27 février, Wade a donné une conférence de presse lors de laquelle il félicitait le peuple sénégalais pour sa démocratie, qu’il irait au second tour, laissant tout de même entendre qu’une victoire au premier tour était encore possible. Le meilleur scénario serait que Wade se retire. Cela lui vaudrait une fin de règne éloquente et la paix sociale pour les Sénégalais.

Texte et photos* : Elise Picon

*Les photographies ont été prises dans 3 bureaux de vote du quartier populaire Grand Yoff entre 9 h et 12 h.