Energie

Gaz de schiste : premier test pour Ségolène Royal

Energie

par Maxime Combes

Ségolène Royal s’est dite, encore récemment, opposée à l’exploitation des hydrocarbures de schiste « en l’état actuel des technologies, car elles sont dangereuses ». La nouvelle ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie va avoir l’occasion de le prouver. Dans une lettre envoyée le 10 mai, les collectifs citoyens opposés à l’exploitation de gaz et pétrole de schiste lui demandent de ne pas signer la demande de mutation du permis de Mairy (Marne) en faveur de l’entreprise américaine Hess Oil qui recherche du pétrole de schiste. Pourquoi empêcher une mutation d’un permis alors que la fracturation hydraulique est toujours interdite ?

Qui dit mutation dit prolongation de la validité du permis. Celui de Mairy a été délivré en 2007 à l’entreprise texane Toreador. Plusieurs fusions d’entreprises permettent aujourd’hui à l’entreprise états-unienne Hess Oil de revendiquer ce permis. Ce qui a aussi l’avantage de maintenir la légalité administrative d’un permis devenu caduc : les prédécesseurs de Ségolène Royal n’ont signé ni autorisation de mutation, ni de prolongation du permis de Mairy, ce qui vaut rejet implicite de la demande de l’entreprise. Mais ce refus n’a pas été dûment motivé par les services de l’État. Résultat, le 30 avril dernier, le Conseil d’État, saisi par Hess Oil, a condamné la France à payer une astreinte de 10 000 euros par jour si aucune décision argumentée n’était publiée dans un délai d’un mois. Dans leur lettre, les collectifs citoyens estiment craindre « une signature imminente de l’arrêté de mutation du permis de Mairy au profit de l’entreprise Hess », plutôt que la publication d’une telle justification.

Supercherie

Pareille mésaventure est arrivée à l’automne 2013 à Philippe Martin, prédécesseur de Ségolène Royal à l’Hôtel de Roquelaure. Une décision identique du Conseil d’État portant sur sept permis a été présentée par des services du ministère comme une injonction obligeant le gouvernement à signer la mutation des permis au profit de Hess Oil. C’est grâce à la détermination des collectifs contre les gaz et pétrole de schiste que Philippe Martin et son cabinet se sont rendus compte de la supercherie. Le Conseil d’État ne le condamnait pas à valider la mutation des permis au profit de Hess Oil mais à justifier leur refus. Philippe Martin a tenu bon et n’a pas signé les arrêtés de mutation.

Ségolène Royal en fera-t-elle autant en s’appuyant sur l’expertise des collectifs citoyens ? Ou bien sera-t-elle celle qui cèdera devant la pression ? Valider la mutation, donc prolonger le permis, contribuera inévitablement à fragiliser la loi d’interdiction de la fracturation hydraulique et les précédents engagements du gouvernement en la matière.

Maxime Combes