Inégalités

Fiscalité : les revenus du capital n’ont jamais été aussi peu taxés

Inégalités

par Nolwenn Weiler

« Un allègement sans précédent dans l’histoire de l’imposition des revenus en France. » C’est ainsi que la fondation Jean Jaurès définit dans une note relayée par l’Obs, la réforme fiscale mise en place en France en janvier 2018. Selon la fondation, c’est la première fois, depuis la création de l’impôt sur le revenu en France il y a un siècle, que les revenus du capital sont aussi peu taxés par rapport aux revenus du travail. La fiscalité sur les revenus du patrimoine diminue fortement, passant d’une imposition progressive sur le revenu à un « prélèvement forfaitaire unique » (ou flat tax) fixé à 30 %. Coût estimé de la mesure : 1,3 milliard d’euros.

Idem pour l’imposition du patrimoine financier qui diminue avec la sortie des biens mobiliers de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Montant de ce second cadeau fait aux détenteurs de patrimoine : 3,2 milliards d’euros. « 1% des ménages bénéficieront de 44% des gains liés, par exemple, à la mise en place de la flat tax, dit la fondation Jean Jaurès. Le gain moyen issu de la réforme fiscale dans son ensemble, pour les "1%", sera de plus de 10 000 euros par an environ. » Pour les 100 contribuables les plus riches, le gain serait de 1,5 million d’euros en moyenne.

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L’accumulation du patrimoine est de moins en moins taxée. Et le phénomène n’est pas compensé par une taxation accrue de la transmission de ce patrimoine entre générations, comme l’avait pourtant évoqué le candidat Macron lors de sa campagne présidentielle. « Le sujet est d’importance car le patrimoine des ménages augmente plus vite que leur revenu, souligne le rapport de la fondation Jean Jaurès. Il est très inégalement réparti et le risque est grand que le vieillissement de la population ne se traduise par une concentration accrue des patrimoines au sein des générations les plus âgées de la population. D’ores et déjà, la part du patrimoine hérité atteint 70% du patrimoine total, et pourrait atteindre 90% dans 30 ans, soit le niveau de 1850. »

La nouvelle loi a créé une énorme niche fiscale. Pour la grande majorité des citoyens qui tirent leur revenu du travail salarié, la contribution au service public prendra la forme d’un impôt progressif qui pourra atteindre 55 % de leurs revenus. Tandis que ceux qui tirent essentiellement ou exclusivement leur revenu du capital ne pourront pas être taxés au-delà de 30 %. « La réforme de la fiscalité du capital est avant tout guidée par des motivations politiques, dénonce la fondation : « Récompenser ceux qui réussissent par l’argent, et ceux qui ont hérité de la réussite de leurs ascendants, sans considération en matière d’inégalités (...). Les 5% de ménages les plus aisés voient leur niveau de vie progresser de 1,6% en moyenne, quand les 5% les plus pauvres voient leur niveau de vie décroître de 0,6% en moyenne. » 

Nolwenn Weiler

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Photo : CC Garrett Bromley